Rémunération alternative des dirigeants fondateurs de sociétés du numérique : les droits d’auteur 

Par Maître, Laure-Lise GINER, Associé

L’optimisation de la rémunération du dirigeant d’une société soumise à l’impôt sur les sociétés constitue un véritable enjeu au regard du coût qu’elle constitue à la fois pour la société et pour le dirigeant. A titre d’exemple, la rémunération du président de SAS est soumise à un taux de cotisation d’environ 65% de son net (ce taux varie en fonction du montant de la rémunération), auquel il faut ensuite ajouter l’impôt sur le revenu au taux progressif allant jusqu’à 45 %. 

Or, dans les sociétés du secteur du numérique les dirigeants travaillent souvent sur la création d’applications logiciels, sur des créations issues de méthodologie inventive (formation, processus, concept), de nouveau design ou création intellectuelle originale. Ce travail du dirigeant peut alors lui permettre de revendiquer des droits d’auteur lui octroyant un régime fiscal avantageux afin d’augmenter son revenu net grâce à une diminution des coûts fiscaux et sociaux. 

En effet, dès lors qu’une personne produit en tant qu’individuel des œuvres originales protégées par la propriété intellectuelle (logiciel, méthodologie, concept, design, etc.) ou dépose des titres de propriété industrielle (marques, dessins et modèles, brevet), ces œuvres lui appartiennent dans son patrimoine privé. Le revenu perçu par le biais de droits d’auteur se manifeste de plusieurs manières : 

-      Revenu issu de la création de la marque déposée par le dirigeant et utilisée par la société 

-      Revenu issu de son travail en tant que créateur indépendant de logiciel 

-      Revenu issu de son travail de de création et concept ou design « original » 

Si la société créée par le dirigeant, ou des sociétés tierces, souhaitent utiliser ces services ou œuvres originales détenues par le dirigeant, ce dernier pourrait percevoir une rémunération de droits d’auteur en contrepartie de cette utilisation appelée « licence » ou « concession ». 

Avantages d’un revenu issu de la concession de droits d’auteur 

  • Les droits d’auteur peuvent se cumuler avec les allocations chômage mais aussi avec une rémunération de salarié / dirigeant 
  • Les droits d’auteur bénéficient d’une fiscalité avantageuse : déductible chez la société qui le verse, elle est imposable chez l’auteur de la manière suivante : 

Création, Concept, Design, Marque  

ImpositionBase d’imposition
Impôt sur le revenuIR sur 66% du chiffre d’affaires (régime micro-BNC jusqu’à 72.500 euros de chiffres d’affaires en N-1 et/ou N-2  
ou
Option pour le régime réel vous permettant de déduire toutes les charges se rapportant à ce revenu   
Cotisation socialesCotisations sociales des indépendants (taux global entre 30-35%).
En micro-BNC l’assiette est réduite de l’abattement de 34 % 

Logiciels 

ImpositionBase d’imposition
Impôt sur le revenuTaux fixe de 10% 
Cotisation socialesCotisations des auteurs, généralement en dessous des 17,2 %  

Points de vigilances

  • Bien distinguer les œuvres créées seulement par le dirigeant et celles crées par le dirigeant en tant qu’indépendant puis par les salariés de la société. En effet, à l’exception des logiciels dans certains cas, toutes œuvres réalisées par les salariés seront considérées comme leur appartenant. Il faudra alors distinguer un « avant » salarié et « après » car l’auteur indépendant ne pourra pas se faire rémunérer pour un travail de propriété intellectuelle effectué par un salarié de l’entreprise ; le raisonnement est identique pour toute autre personne intervenant sur les œuvrés créées (freelance, stagiaire, etc.) ; 
  • La protection par la propriété intellectuelle ne requière aucun formalisme contrairement à la propriété industrielle (marque, dessins et modèles et brevet). Les critères de protection par la propriété intellectuelle (une forme originale) peuvent cependant être difficile à prouver en cas de contentieux ; 
  • Les investisseurs extérieurs qui participent à l’actionnariat dans le cadre d’une levée de fonds requièrent souvent que la propriété intellectuelle soit détenue par la société. Or dans le schéma décrit ci-dessus, la propriété intellectuelle appartient aux dirigeants dans leur patrimoine privé en tant qu’auteur indépendant créateur de propriété intellectuelle et, le cas échéant, aux salariés. Si un tel schéma est mis en place, il conviendra avant la levée de fonds de transférer la propriété intellectuelle dans la société, ce qui permettra notamment au dirigeant de recevoir un produit fiscalement intéressant puisqu’il bénéficie du même régime fiscal que la concession de droits. Pour ce faire il convient de conclure des contrats de cession entre les dirigeants et la société mais également d’insérer des clauses de cession de propriété intellectuelle dans les contrats de travail.